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Le Bio s’oppose à la dérèglementation de l’édition génétique

4 juillet 2022

Le secteur biologique s'oppose au laisser-aller du Canada en matière d'édition génétique

Si les directives proposées sont adoptées, les agriculteurs et les jardiniers planteront des semences sans savoir si elles sont génétiquement modifiées.


Les technologies d’édition génétique évoluent et l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) et Santé Canada (SC) ont reçu de multiples demandes de renseignements concernant les nouvelles technologies qui pouvaient être utilisées et celles qui ne le pouvaient pas. Par conséquent, l’ACIA et Santé Canada mènent actuellement une révision des critères d’évaluation des semences génétiquement modifiées (GM) par la technologie CRISPR.
 
La technologie CRISPR diffère de la technologie déjà connue qui consiste à introduire un ADN étranger dans le génome d’une variété. Avec la technologie CRISPR, les phytogénéticiens utilisent simplement des ciseaux moléculaires (appelés CAS9) pour couper et modifier une partie de l’ADN d’une cellule afin d’améliorer ou d’éliminer une ou plusieurs de ses fonctions.

L’ACIA et Santé Canada considèrent que ce simple découpage d’un gène ne crée pas nécessairement un caractère nouveau et que la variété concernée ne devrait être soumise au même processus d’évaluation appliqué aux OGM « traditionnels ».
 
Selon les directives proposées par l’ACIA, le sélectionneur de semences déterminerait simplement par lui-même si un caractère nouveau a été créé avec sa manipulation génétique et, dans la négative, il pourrait commercialiser et vendre sa nouvelle variété GM aux agriculteurs sans même en avertir les agences gouvernementales, et sans avoir à indiquer sur l’étiquette que la semence est génétiquement modifiée.

Comme le confirme l’adage, on ne peut pas arrêter le progrès.

Le gouvernement mettra-t-il en œuvre cette autorégulation par les semenciers ? 


Les développeurs de produits GM décideront-ils seuls si leur produit est suffisamment sûr pour entrer sur le marché ?


Le secteur biologique est littéralement choqué par ce «laisser faire »

Comme le rapporte le Réseau canadien d’action sur les biotechnologies (RCAB): 
 » Il est clair que l’édition du génome peut donner lieu à des erreurs génétiques. Il s’agit notamment d’effets hors cible, d’effets sur cibles involontaires, d’interférences avec la régulation des gènes et d’effets dus à l’insertion intentionnelle ou non d’ADN. Les erreurs génétiques peuvent entraîner des effets inattendus et imprévisibles dans l’OGM qui en résulte. Des effets inattendus tels que la modification de la composition des protéines pourraient avoir un impact sur la salubrité des végétaux et des animaux modifiés par le génome. »

 
À l’heure actuelle, les OGM sont clairement identifiés sur l’étiquette des sacs de semences. Mais ce qui est doublement troublant, c’est que l’ACIA n’obligera pas les sélectionneurs à informer les agriculteurs du  » statut génétique  » des semences qu’ils achètent si les sélectionneurs décident qu’elles n’incluent pas de caractères nouveaux. En effet, pourquoi donc identifier les semences GM qui ne comporteraient pas de caractères nouveaux?
 
Est-ce parce que cela pourrait effrayer les consommateurs et réduire la confiance à l’égard de l’agriculture canadienne ? L’ACIA et Santé Canada n’ont pas pris en compte l’impact socio-économique de leurs nouvelles directives relatives à la biotechnologie CRISPR.

Comme les semences génétiquement modifiées sont clairement interdites dans la production biologique et que la Norme biologique canadienne concerne la biodiversité et l’agriculture durable, le secteur s’oppose fermement au laxisme du gouvernement canadien.

Outre l’industrie biologique, cette question concerne les horticulteurs, une production en pleine expansion au Canada. La technologie CRISPR, initialement appliquée aux grandes cultures, envahit les variétés horticoles. La vente des premiers plants de tomates GABA édités par CRISPR-Cas-9 est survenue en 2021 au Japon. Il est difficile d’estimer la réaction potentielle des consommateurs lorsque les jardiniers réaliseront qu’ils pourraient acheter des semences GM à leur insu ou sans leur consentement.

Quels sont les principaux enjeux pour le bio ?

Toutes les semences GM doivent être identifiables par souci de traçabilité et de transparence.
Le gouvernement doit assurer la coexistence de l’agriculture biologique et de l’agriculture biotechnologique ; les pratiques agricoles ne doivent pas mutuellement se nuire afin de protéger la biodiversité et l’environnement et maintenir la santé des sols si précieuse en production bio. Cela serait en contradiction avec la déclaration de Guelph.


Les producteurs biologiques canadiens ont travaillé d’arrache-pied pour développer l’exportation de leurs cultures, notamment vers l’UE; le secteur biologique a besoin de transparence pour maintenir ses exportations et la confiance dans le label biologique canadien.
La contamination par les OGM par dérive ou par mélange en entrepôt a déjà fortement impacté la production biologique. La production de canola, de soja et de maïs transgéniques au Canada décourage la production biologique de ces plantes, car la détection de résidus des OGM sur les plantes biologiques annule leur statut biologique sur les marchés internationaux. Les agriculteurs bio doivent même payer pour ramener leur production au Canada lorsqu’une juridiction étrangère refuse que le produit  » contaminé  » soit vendu comme biologique sur son territoire. Les producteurs biologiques canadiens ont travaillé d’arrache-pied pour développer l’exportation de leurs cultures, notamment vers l’UE; le secteur biologique a besoin de transparence pour maintenir ses exportations et la confiance dans le label biologique canadien.


La responsabilité de la prévention de la contamination ne doit pas incomber aux producteurs biologiques, mais aux fabricants.
 Plus on cultive d’OGM, plus les coûts d’atténuation de la contamination sont élevés pour les producteurs canadiens qui doivent tester leurs produits à leurs frais avant l’expédition sur les marchés internationaux. Ils conservent également des échantillons. En fait, le produit est testé au port pour l’exportation – également à un coût important pour le producteur.


Certains marchés se fermeront parce que les agriculteurs biologiques n’auront pas pu fournir une confirmation de conformité vérifiable et testable.
Tester les caractères nouveaux est complexe, voire impossible. Certains caractères nouveaux sont totalement indiscernables. Cela dépend de la façon dont les produits sont développés ; certains produits contiennent des artefacts résiduels qui permettent de les détecter, mais il existe des cultures dont l’édition génétique est potentiellement intraçable.


Une déclaration obligatoire indiquant si le produit est génétiquement modifié ou non permettrait aux producteurs biologiques d’identifier ce qu’ils sèment sans faire peser sur leurs épaules la charge du testage souvent inefficace de la présence des caractères nouveaux
 
Dans un monde complexe de mondialisation, la traçabilité doit être renforcée, et non réduite.
La certification des produits biologiques requiert la traçabilité. Les aliments sont expédiés à travers la planète, transitant par divers pays avant d’atterrir sur les étagères canadiennes. Les consommateurs canadiens doivent être en mesure de faire un choix éclairé sur ce qu’ils consomment.

L’agriculture biologique étant gérée « de manière prudente et responsable afin de protéger la santé et le bien-être des générations actuelles et futures ainsi que l’environnement », des tonnes d’autres arguments justifient l’opposition des producteurs biologiques au relâchement administratif à l’égard des végétaux GM. Mais la technologie GE aura bientôt un impact sur l’ensemble du secteur agricole. L’édition génétique est une technologie puissante dans laquelle les brevets créés deviendront d’énormes outils de contrôle par un nombre restreint de semenciers.
 
À l’heure actuelle, la révision des directives de l’ACIA sur l’édition génétique n’est pas complétée. Le secteur biologique exige que l’ACIA rende obligatoire l’identification de tous les types de produits génétiquement modifiés.

La production biologique ne sera maintenue que si l’ACIA considère l’impact potentiellement dévastateur sur le secteur biologique de la présence d’OGM non identifiés et crée un registre public des semences génétiquement modifiées. Rien de moins.

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